E DESSIN DES CAPITALES est
fort simple et rigoureusement logique. Pour reprendre la
théorie dAlphonse Dain, chaque lettre est un
assemblage déléments primitifs que sont
le trait et le rond (I & O).
Avec un trait on obtient le iota (I) et avec deux traits
inscrits dans un carré, on obtient le gamma (G),
le lambda (L), le tau (T) et le chi (C). Avec trois traits,
on obtient le delta (D), le Zêta (Z), le êta
(H), le nu (N) et le pi (P) tandis quavec quatre traits
on obtient lepsilon (E), le mu (M), le sigma (S) et
le xi (X) [La capitale archaïque du xi est traversée
par une barre verticale].
Les lettres rondes sont lomicron (O) et lomega
(W). En gravant au milieu du cercle un point ou une barre,
on obtient le thêta (Q) et le phi (F). Enfin, le bêta
est fait dune barre et de deux moitiés de cercles
(B) alors que le rhô ne présente quune
panse supérieure (R).
Lintérêt dune telle standardisation
est pour Rémy Peignot, lharmonie «quasi
musicale (qui) naît du jeu rythmique des traits. (...)
Dans lassemblage des lettres, des notes en lignes
et en page, le retour périodique de formes simples
facilite la lecture; cela plaît à lil
qui sy retrouve».
De linfluence des supports sur le dessin des lettres
Toutefois, le dessin des lettres va se mettre à
se redifférencier, cette fois en fonction du support
décriture utilisé. Lécriture
monumentale ou lapidaire, est celle que lon va utiliser
pour graver sur la pierre les documents officiels. De forme
rectiligne et anguleuse, elle se distingue nettement des
rondeurs de lécriture des scribes maniant le
calame. Dès le IVème siècle, lécriture
courante va être celle sur papyrus. Les Grecs ont
en général, utilisé le papyrus de la
même manière que les Egyptiens. A ses débuts,
lécriture sur papyrus était très
proche de lécriture épigraphique; appellée
écriture scolaire, ses caractères ne sont
pas liés entre eux, les mots ne sont pas séparés
les uns des autres, les lettres E, S, W gardent leur forme
anguleuse mais commencent à apparaître les
formes arrondies dans les autres lettres. On ne laissait
pas despace entre les mots et pour indiquer quon
passait dun sujet à un autre, on traçait
un petit trait horizontal appelé paragraphos, qui
signifie, «écrit sur le côté».
On écrivait en colonnes sur des bandes de parchemins
ou de papyrus longues de six à neuf mètres
et que lon enroulait autour dun bâton.
Ces rouleaux prirent le nom de biblos du nom de la cité
phénicienne qui fit connaître le papyrus aux
Grecs. Un rouleau plus petit sappelait biblion. Lorsque
le rouleau faisait partie dun ensemble on lappelait
tomos, cest à dire la coupure.
Les écritures grecques médiévales
A côté de cette écriture fondamentale,
dautres genres se développèrent très
rapidement. Lécriture calligraphique était
proche du type scolaire mais le gabarit des caractères,
leur écartement, leurs enjolivements étaient
calculés de façon à produire une impression
artistique; cest lécriture des manuscrits.
Elle évitait les ligatures, ne séparait pas
les mots et était appelée également
onciale ou parfois biblique, par quon la retrouve
dans les trois grands manuscrits bibliques que sont le Codex
Vaticanus, le Codex Sinaiticus et le Codex Alexandrinus.
Lécriture cursive était lécriture
courante, ou étirée comme disaient les Grecs
eux-mêmes. Plus rapide que lonciale, elle se
distingua nettement de sa parente à partir du IIIème
siècle av J-C. Les traits essentiels de la cursive
étaient dune part, la tendance à lier
entre eux les caractères décriture,
dans la mesure où leurs formes sy prêtaient,
et à en simplifier le tracé, à le rendre
plus coulant.
Entre les deux, il existait une écriture administrative
dite de chancellerie qui se rapprochait de la cursive mais
ses lettres étaient grandes, grêles et stylisées,
et lécriture personnelle, celle des gens dune
certaine culture.
Lonciale évolua peu et subsista sous cette
forme quand on substitua le parchemin au papyrus; elle resta
le type même de librairie. La cursive subit elle une
transformation radicale qui finit par aboutir à la
minuscule. Cette dernière a dégagé
et précisé une des caractéristiques
alors embryonnaire de lécriture de chancellerie,
à savoir le système des quatres lignes. Les
lettres de lécriture monumentale, comme celle
de lonciale et de notre capitale latine, sont en effet
toutes de la même hauteur: on peut en délimiter
leur tracé par deux lignes.
Au début du IVème siècle, la chancellerie
impériale, désormais fixée à
Constantinople, imposa la cursive byzantine qui subit linfluence
de la cursive latine contemporaine, au point que les deux
écritures pouvaient facilement se confondre. Cette
nouvelle cursive a joué un rôle décisif
lors de la véritable renaissance qua connue
au VIIIème siècle lEmpire byzantin.
La nouvelle écriture grecque, celle qui est aujourdhui
encore employée tant pour les livres imprimés
que dans la vie courante, la minuscule, sest en effet
formée à partir de la cursive: tout en gardant
certaines ligatures usuelles et claires, elle a séparé
les lettres, réintroduit, aux IXème et Xème
siècles, certaines formes onciales, réduit
la dimension des lettres et su allier à la clarté
des onciales la fluidité et la rapidité des
cursives; elle a conservé et régularisé
lusage des signes diacritiques, esprits et accents,
introduits par les Alexandrins.
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