Typographie & Civilisation
MyFonts
   
 
Histoire de l'imprimerie
Alphabet grec
     

CHAPITRE TROISIEME

Evolution de l’écriture grecque

E DESSIN DES CAPITALES est fort simple et rigoureusement logique. Pour reprendre la théorie d’Alphonse Dain, chaque lettre est un assemblage d’éléments primitifs que sont le trait et le rond (I & O).

Avec un trait on obtient le iota (I) et avec deux traits inscrits dans un carré, on obtient le gamma (G), le lambda (L), le tau (T) et le chi (C). Avec trois traits, on obtient le delta (D), le Zêta (Z), le êta (H), le nu (N) et le pi (P) tandis qu’avec quatre traits on obtient l’epsilon (E), le mu (M), le sigma (S) et le xi (X) [La capitale archaïque du xi est traversée par une barre verticale].

Les lettres rondes sont l’omicron (O) et l’omega (W). En gravant au milieu du cercle un point ou une barre, on obtient le thêta (Q) et le phi (F). Enfin, le bêta est fait d’une barre et de deux moitiés de cercles (B) alors que le rhô ne présente qu’une panse supérieure (R).

L’intérêt d’une telle standardisation est pour Rémy Peignot, l’harmonie «quasi musicale (qui) naît du jeu rythmique des traits. (...) Dans l’assemblage des lettres, des notes en lignes et en page, le retour périodique de formes simples facilite la lecture; cela plaît à l’œil qui s’y retrouve».

De l’influence des supports sur le dessin des lettres

Toutefois, le dessin des lettres va se mettre à se redifférencier, cette fois en fonction du support d’écriture utilisé. L’écriture monumentale ou lapidaire, est celle que l’on va utiliser pour graver sur la pierre les documents officiels. De forme rectiligne et anguleuse, elle se distingue nettement des rondeurs de l’écriture des scribes maniant le calame. Dès le IVème siècle, l’écriture courante va être celle sur papyrus. Les Grecs ont en général, utilisé le papyrus de la même manière que les Egyptiens. A ses débuts, l’écriture sur papyrus était très proche de l’écriture épigraphique; appellée écriture scolaire, ses caractères ne sont pas liés entre eux, les mots ne sont pas séparés les uns des autres, les lettres E, S, W gardent leur forme anguleuse mais commencent à apparaître les formes arrondies dans les autres lettres. On ne laissait pas d’espace entre les mots et pour indiquer qu’on passait d’un sujet à un autre, on traçait un petit trait horizontal appelé paragraphos, qui signifie, «écrit sur le côté».

On écrivait en colonnes sur des bandes de parchemins ou de papyrus longues de six à neuf mètres et que l’on enroulait autour d’un bâton. Ces rouleaux prirent le nom de biblos du nom de la cité phénicienne qui fit connaître le papyrus aux Grecs. Un rouleau plus petit s’appelait biblion. Lorsque le rouleau faisait partie d’un ensemble on l’appelait tomos, c’est à dire la coupure.

Les écritures grecques médiévales

A côté de cette écriture fondamentale, d’autres genres se développèrent très rapidement. L’écriture calligraphique était proche du type scolaire mais le gabarit des caractères, leur écartement, leurs enjolivements étaient calculés de façon à produire une impression artistique; c’est l’écriture des manuscrits. Elle évitait les ligatures, ne séparait pas les mots et était appelée également onciale ou parfois biblique, par qu’on la retrouve dans les trois grands manuscrits bibliques que sont le Codex Vaticanus, le Codex Sinaiticus et le Codex Alexandrinus.

L’écriture cursive était l’écriture courante, ou étirée comme disaient les Grecs eux-mêmes. Plus rapide que l’onciale, elle se distingua nettement de sa parente à partir du IIIème siècle av J-C. Les traits essentiels de la cursive étaient d’une part, la tendance à lier entre eux les caractères d’écriture, dans la mesure où leurs formes s’y prêtaient, et à en simplifier le tracé, à le rendre plus coulant.

Entre les deux, il existait une écriture administrative dite de chancellerie qui se rapprochait de la cursive mais ses lettres étaient grandes, grêles et stylisées, et l’écriture personnelle, celle des gens d’une certaine culture.

L’onciale évolua peu et subsista sous cette forme quand on substitua le parchemin au papyrus; elle resta le type même de librairie. La cursive subit elle une transformation radicale qui finit par aboutir à la minuscule. Cette dernière a dégagé et précisé une des caractéristiques alors embryonnaire de l’écriture de chancellerie, à savoir le système des quatres lignes. Les lettres de l’écriture monumentale, comme celle de l’onciale et de notre capitale latine, sont en effet toutes de la même hauteur: on peut en délimiter leur tracé par deux lignes.

Au début du IVème siècle, la chancellerie impériale, désormais fixée à Constantinople, imposa la cursive byzantine qui subit l’influence de la cursive latine contemporaine, au point que les deux écritures pouvaient facilement se confondre. Cette nouvelle cursive a joué un rôle décisif lors de la véritable renaissance qu’a connue au VIIIème siècle l’Empire byzantin. La nouvelle écriture grecque, celle qui est aujourd’hui encore employée tant pour les livres imprimés que dans la vie courante, la minuscule, s’est en effet formée à partir de la cursive: tout en gardant certaines ligatures usuelles et claires, elle a séparé les lettres, réintroduit, aux IXème et Xème siècles, certaines formes onciales, réduit la dimension des lettres et su allier à la clarté des onciales la fluidité et la rapidité des cursives; elle a conservé et régularisé l’usage des signes diacritiques, esprits et accents, introduits par les Alexandrins.

     

Alphabet grec
Alphabet grec

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Codex Sinaiticus
Exemple d’écriture
onciale grecque
Codex Sinaiticus, ca IVe siècle