Typographie & Civilisation
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Histoire de l'imprimerie
Imprimerie toulousaine
     

CHAPITRE QUATRIEME

Le temps des controverses (XVIe siècle)

La quatrième vague (1500-)

En 1508, Jean Faure publiait son Guide pour les pélerins visitant la Terre Sainte. Ce libraire, devenu sur le tard imprimeur, exerçait son art rue de Rémusat à l’enseigne des cinq plaies, près de Saint Sernin. Il est décédé en 1522.

Guyon Boudeville qui exerça à la même époque nous est connu par ses livres richement illustrés et par l’usage qu’il fit de l’italique pour la première fois à Toulouse. Il avait également une tendance certaine à éditer des ouvrages polémiques. Son penchant pour le protestantisme, qui le conduira à imprimer semi-clandestinement des ouvrages de propagande protestante, le conduira tout droit à l’échafaud. Sa marque représentait un aigle perché sur un livre posé sur une tête de méduse avec pour devise: « Velis, nolis », « Que tu le veuilles on non ».

Jacques Colomiès, le grand toulousain

Il en va autrement de Jacques Colomiès, orfèvre toulousain et heureux possesseur d’une métairie entre Puyjaudran et Lille-Jourdain. Il avait épousé en première noce Mondette Guimbaud, veuve de Jean Faure et nièce de Jean Grandjean et en seconde noce Françoise Dumas, qui lui donna deux fils Arnaud et Jacques II qui devinrent également imprimeurs, perpétuant une maison qui ne s’éteignit qu’en 1750.

Celui qui est considéré comme le plus grand imprimeur toulousain et en tous les cas certainement le plus actif de ce siècle, publia en 1527 son premier ouvrage, le Liber de concordatas. Il imprima des ordonnances en excellent français, aussi pur que celui de Rabelais (qui n’avait encore rien écrit) ou de Ronsard (qui n’était lui même pas né) et signé « Imprimeur à Tholose, rue d’Agulhère, devant les monges de Saint Sernin ».

En 1534, il publia un curieux ouvrage, qui montre son goût du débat, les Controverses des sexes masculins et féminins de Gratian du Pont, « imprimé par Maître Jacques Colomiès, maître imprimeur bien formé, lequel se tient et demeure rue d’Agulhère, devant les Saturnines, nonain et dévot couvent ».

Il est réputé pour ses belles réalisations au format inhabituel et remarquables par leur typographie archaisante. Catholique zélé, il fut l’imprimeur attitré du clergé languedocien et produira de nombreux ouvrages qui pourfendront les Protestants. Sa marque typographique pourtant représentait un pélerin de Saint Jacques de Compostelle devant une colombe. Il jouera enfin, un rôle actif dans la renaissance de la production en langue d’Oc. Il est mort à un âge très avancé en 1594.

Le livre toulousain au XVIe siècle

A Toulouse, les éditions du début du XVIe siècle ont continué à subir l’influence lyonnaise, copiant les lourds frontispices des imprimeurs lyonnais. Jacques Colomniès tenta de s’affranchir de cette tutelle et le prouve en 1534, en utilisant pour illustrer les Controverses, des bois d’inspiration très personnelle.

Les colophons donnent toujours des indications sur le livre, présentant l’imprimeur et le librairie qui avait commandité l’ouvrage. Parfois, le colophon perd son statut de carte d’identité du livre pour se transformer en amusante réclame comme celui des Hystoires et lettres du glorieux... frère André de Spolète, imprimé en 1532 par Jacques Colomiès:

« Imprimé fut cestuy petit propos,
A la requeste du marchant Jehan Barril,
Par celluy la qui ne quiert que repos.
Au vin se preuve la bonté du barril. »

Malgré les corrections, il arrive souvent que les livres doivent être complété par un Errata, une invention de l’humaniste Erasme. Quelquefois, ces erreurs sont corrigées alors que le livre est en cours d’impression. Ainsi, dans Les controverses des sexes masculins et féminins de Gratien du Pont, imprimé à Toulouse en 1534, on pouvait lire l’Errata suivant: « Sensuyt le dict errata... Et premierement il fault noter que toutz lers livres de cette impression ne sont pas subgectz au present errata, car les ungs ont este corrigez presque au commencement de limpression, les aultres vers le milieu, les aultres vers la fin, et les aultres poinct...»

     

 

Historiarum enarratio in Paradoxa Ciceronis
Illustration de l’Historiarum enarratio in Paradoxa Ciceronis de Mathurin Alamande, Jean Faure, 1519

 

 

 

 

Controverses des sexes masculins et féminins
Page de couverture des Controverses,
Toulouse, 1534