Typographie & Civilisation
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Histoire de l'imprimerie
Imprimerie coréenne
     

CHAPITRE DEUXIEME

Le long règne du roi Sejong

A FABRICATION DES CARACTERES KYEMI se poursuivit sous le roi Sejong (1418-1450), fils de T’aejong qui manifesta le même enthousiasme que son père pour l’impression et son amélioration. Avec lui, la typographie coréenne connut son âge d’or. Politiquement, le règne de Séjong correspond à une période de consolidation politique pour la dynastie Joseon. Sous son long règne, Sejong que les chroniques baptisent de « Yao et Shun du Pays de l’Est » en référence aux deux empereurs les plus vénérés de la Chine antique, favorisa le développement de l’économie et des techniques, renforçant le besoin de livres dans le royaume.

Le roi Sejong s’impliqua fortement dans le développement de l’imprimerie. Il fut ainsi à l’origine de la réforme de l’alphabet et, preuve de son vif intérêt pour la chose imprimée, rapatria le Chuja So au palais Kyongbok. Toutefois, en bon confucianiste, le roi s’opposa à toute activité commerciale du livre et interdit même cette pratique.

Les caractères Kyongja

En 1420, le Chuja So fondit à la demande du roi de nouveaux caractères qui sont aujourd’hui appelés de l’année de leur création, l’année Kyongja. La chronique du roi Sejong (Sejong Sillok) relate ainsi l’évènement:

Le roi, après une étude personnelle des défauts, ordonna à Joseon Ch’on, le deuxième ministre du Ministère des travaux et à Nam Kup, de fondre des caractères perfectionnés afin que les problèmes causés, pendant la composition par les plaques de bronze recouvertes de cire d’abeille, soient résolus. Les nouveaux caractères étaient si pratiques que pas un seul d’entre eux ne bougeaient lorsqu’on imprimait à la suite des centaines de feuilles. Très satisfait de ce résultat, le roi organisa plusieurs fêtes en l’honneur du ministre Joseon (...)
Les caractères Kyongja étaient de forme carrée et beaucoup plus réguliers que leurs prédécesseurs les caractères Kyemi. Certains d’entre eux étaient de forme parfaitement cubique ce qui facilitait leur agencement et évitait le recours à la cire d’abeille pour les maintenir en place. Le tirage s’en ressentit puisque l’on passa à une vingtaine de feuilles par jour.

Les caractères Kabin

Cependant, les caractères Kyongja étaient encore trop petits pour une lecture facile. En 1434, furent donc fondus les caractères Kabin, plus grands et plus raffinés que leurs prédécesseurs. Avec les caractères Kabin, le recours à la cire d’abeille était inutile. Pour maintenir les caractères en place, on insérait de petits morceaux de bambou dans l’espace séparant deux caractères. Avec les caractères Kabin, il était possible d’imprimer quarante feuilles par jour. Ces caractères correspondent à l’apogée de la typographie coréenne. Ils furent refondus cinq fois au cours des siècles qui suivirent.

A la même époque, trois autres types de caractères étaient utilisés:

  • les caractères Pyongjin, les premiers caractères en plomb coréens. Le plomb présentait l’avantage sur le bronze d’être plus facile à fondre, sa température de fusion étant inférieure à celle du bronze,
  • les caractères Han’gul à la fin des années 1940 qui furent fondus sur le modèle des caractères Kabin, après la promulgation du nouvel alphabet Un débat subsiste toutefois pour savoir s’ils furent réalisés en bois ou en bronze,
  • les caractères utilisés pour le Tongguk Chongun qui furent vraisemblablement réalisés en bois.


La réforme de l’alphabet

En 1420, Sejong fonda l’Académie Royale, Chiphyon Chon. Celle-ci, sur instruction du roi, fut à l’origine de la création en 1443 de l’alphabet coréen, inspiré de l’alphabet sanscrit, appelé Han’gul qui fut officiellement promulgué en 1446.

Traditionnellement, les lettrés coréens avaient recours aux caractères chinois pour transcrire le chinois classique (la Corée était un royaume vassal de l’empire chinois) et le coréen selon le système Edu. Ce dernier système consistait à prendre certains caractères chinois pour leur valeur sémantique, indépendamment de la prononciation et d’autres pour leur valeur phonétique sans tenir compte de leur signification.

Dans la préface de son livre publié en 1446, Oje Hunmin Chongum (La vraie prononciation enseignée au peuple), le roi Sejong explique clairement ses motivations:

La langue coréenne étant différente de la langue chinoise, les caractères chinois ne la rendent pas suffisamment. C’est pourquoi, les gens du peuple désirent une chose et n’arrivent pas à exposer leurs sentiments: cela est fréquent. Emu de pitié, j’ai inventé vingt-huit caractères qui seront facilement appris de tous et serviront aux usages quotidiens.
Cet alphabet de 28 lettres est de conception très scientifique. La forme des consonnes, au nombre de quatorze, reproduit la position des organes qui participent à leur articulation, quant aux voyelles, au nombre de onze, elles dérivent toutes des trois voyelles de base: le trait horizontal symbolisant la terre (plate comme une galette dans la tradition chinoise), le point représentant le ciel (auquel on attribuait la forme d’un dôme) et le trait vertical, l’homme qui assure le lien entre la terre et le ciel.

Paradoxalement, le travail de préparation de matrices de types ne fut pas vraiment simplifié pour autant, car les lettres ne s’emploient jamais isolément, mais sont rassemblées en groupes syllabiques d’aspect carré. Ce syllabaire exigeait un nombre de groupes pouvant atteindre le chiffre de 4.400.

     

Caractères Kyemi
Caractères Kyemi

 

 

 

Caractères Kyongja
Caractères Kyongja

 

 

 


Caractères Kabin
Caractères Kabin

 

 

 

 

 

 

Caractères Hangul
Caractères Hangul